La Mer Rouge (4e partie) : Les « gros » poissons

     Suite de la présentation des habitants des récifs de Mer Rouge... mais cette fois, place à des espèces plus grosses, voire un peu plus dangereuses. Des espèces que les plongeurs assoiffés de frissons et d’émotions fortes espèrent rencontrer quand ils viennent en Égypte. Entre nous, aucun poisson n’est réellement dangereux pour l’homme à la condition de ne pas le déranger, de ne pas l’agresser car, s’il n’attaque pas l’homme de lui-même, il saura se défendre ! Voici une sélection de quelques poissons plutôt impressionnants...

     Le mérou (Serranidé) n’a rien de dangereux mais lorsque votre route croise celle d’un spécimen de près d’un mètre, il y a de quoi frémir ! Il existe même une espèce de mérou géant long de près de 2m50 et pesant jusqu’à 300 kg, mais elle est très rare. Le mérou est un prédateur redoutable avec ses dents acérées ; il se nourrit de petits poissons et crustacés. Il peut vivre très longtemps... lorsque le pêcheur ne l’attrape pas pour garnir nos assiettes gourmandes ! C’est un solitaire qui s’éloigne peu de son territoire. Il existe plusieurs couleurs et plusieurs formes ; ci-contre un mérou corallien endémique de la Mer Rouge. Ici aussi survient une inversion sexuelle : la femelle devient mâle après quelques années. Il existe aussi des espèces hermaphrodites, à la fois mâles et femelles.

     Avec le baliste Titan à droite (famille des Balistidés qui compte 40 espèces), finis les gentils petits poissons ! Long de 75 cm et doté d’une sacrée dentition, le baliste défend vigoureusement ses œufs en période de ponte, et alors gare au plongeur qui s’en approche d’un peu trop près... certains y ont laissé des bouts de palmes ! Le baliste se nourrit de corail et de petits invertébrés qu’il débusque en soufflant dans le sable. Il a aussi un drôle de mécanisme de défense, une épine dorsale verticale érectile : face à un ennemi ou la nuit, il se réfugie dans un creux du récif et déclenche l’érection de cette épine, ce qui lui permet de rester coincé dans son trou et de ne pouvoir être emporté par un prédateur.

     Une autre rencontre plutôt inquiétante, celle du barracuda, ce long poisson argenté rayé de noir de la famille des Sphyrénidés. Sa mâchoire dotée de dents bien visibles et bien acérées n’inspire en effet pas toujours confiance. Il mesure entre 1m30 et 1m70 et évolue entre 10 et 90m de profondeur. C’est un prédateur vorace qui se nourrit de petits poissons. Le jour, il arrive de le voir en banc serré attendant le crépuscule pour partir chasser. A l’âge adulte, le barracuda quitte le banc pour partir vivre en solitaire.

     Et voici le chouchou des plongeurs, le poisson Napoléon qui doit son nom à la bosse frontale en forme du chapeau du célèbre empereur. Ce mastodonte peut peser jusqu’à 200 kg et mesurer 2m30. Il fait partie de la famille des Labres qui compte environ 500 espèces, des plus petites mesurant quelques cm aux géants de 2m. Sa mâchoire articulée lui permet d’avancer démesurément les lèvres pour engloutir son repas. C’est un poisson calme et prudent, pas facile à approcher. Il se fait d’ailleurs de plus en plus rare. Depuis que les Asiatiques ont trouvé à ses lèvres épaisses des vertus aphrodisiaques, le Napoléon fait l’objet d’une pêche intensive et cruelle. En Chine, sa chair est vendue à prix d’or et on continue toujours d’en servir aux repas de noces...

     La murène est fréquente en Mer Rouge et reconnaissable à sa forme allongée telle un serpent, parfois jusqu’à 3m de long. En dépit de la crainte qu’elle inspire, la murène est un poisson timide qui passe son temps caché dans les cavités des récifs et qui n’attaque pas l’homme. Si vous vous approchez de sa gueule (toujours ouverte), vous constaterez la présence de nombreuses petites dents aiguisées que des labres nettoyeurs viennent nettoyer. Il est toujours étonnant d’ailleurs de voir cet échange de bons procédés (le labre nettoyeur débarrasse son client des parasites, déchets, restes de repas et s’en nourrit au passage) sans que le gros essaie de manger le petit !

     Contrairement à la légende, la Mer Rouge n’est pas infestée de requins ! Il est même rare d’en rencontrer lors de baignades le long des côtes ; c’est en pleine mer que l’on en rencontre le plus souvent. Certains prétendent que leur nombre diminue d’année en année. Les requins sont en effet victimes d’une pêche de plus en plus importante. Dans certaines régions, ils sont pêchés en masse et revendus dans les pays asiatiques où ils sont prisés pour les vertus soit disant aphrodisiaques de leurs ailerons... Cela dit, il reste encore des requins en Mer Rouge ; de nombreuses espèces s’y côtoient. Citons, parmi les plus fréquents, le requin à pointes blanches (2m de long), le requin gris (1m80/2m30), le requin marteau (4m20), le requin soyeux (3m30) et le requin océanique (Longimanus) chouchou des plongeurs, etc. Ces espèces ne sont pas dangereuses pour l’homme... à la condition de ne pas les agresser bien sûr ! Ce sont finalement des poissons tranquilles, plutôt timides et difficiles à approcher. On les voit généralement entourés de leurs petits poissons pilotes, qui voyagent avec eux, leur font la toilette et, en se plaçant devant eux, masquent la forme du requin qui peut ainsi passer incognito... Malin !

     Comme le requin, la raie pastenague à tâches bleues est un poisson cartilagineux c'est-à-dire que son squelette n’est pas constitué d’os contrairement aux autres poissons vus jusqu’à présent. Il existe plusieurs espèces de raies en Mer Rouge, mais celle-ci est très fréquente et si jolie avec sa robe jaune vert à pois bleu vif. Chez la raie, pas de nageoires mais des ailes... et il faut la voir évoluer en pleine eau, un spectacle très poétique ! Elle repose le plus souvent sur le sable en attendant qu’une proie passe. Son système sensoriel très sophistiqué lui permet de capter le moindre champ électrique émanant des organismes vivants.

     Difficile de parler de tous les poissons vivant en Mer Rouge, ils sont si nombreux ! Mais, je ne peux pas vous quitter sans citer 2 stars de la Mer Rouge, dont la rencontre très recherchée n’est hélas plus si fréquente, mais quel émerveillement quand elle se produit : la tortue, reptile de 120 kg environ dont le seul ennemi, outre l’homme, est le requin ; et le dauphin, mammifère sociable, intelligent et très attachant dont les sauts autour du bateau et les danses aquatiques vous enchanteront. Ces rencontres magiques, je vous les souhaite !...

 

 

Véronique 

 

 

 

A lire dans le prochain numéro : « Où aller en Mer Rouge ? »

 

 

BIBLIOGRAPHIE : « La Mer Rouge et l’Océan Indien » (Steven Weinberg, éd. Nathan) - « La Mer Rouge » (Andrea Ghisotti, éd. Bonechi) - « Mer Rouge, guide du récif corallien » (H. Debelius, éd.Ulmer)

PHOTOS : Stéphane Adam, Eric Deneve, Véronique.

 

Dernière mise à jour le : mercredi 24 août 2016